Décidément, 2018 est une année bien remplie; de plaisir.
La progression continue grâce à une meilleure écoute de mes sensations et à ce travail de la foulée; largement basée sur la méthode Light Feet Running (mon bilan 2017 ici).
Le contexte
Ayant abandonné l’idée d’un marathon, j’étais sans objectif. Le nouveau plan d’entrainement que j’avais commencé ne me convenait pas. Et puis je me suis rendu compte que je ne voulais pas d’un plan avec autant de rigueur. Je ne prenais pas de plaisir.
D’autre part, la conférence UT4M à Grenoble de mon ami Sébastien Cornette m’a rappelé à quel point suivre un plan à la lettre (sans tenir compte de ses sensations, sans apporter les ajustements nécessaires) posait pas mal de contraintes.
J’ai alors simplement décidé de maintenir un bon volume d’entrainement et gagner de la souplesse en le structurant différemment. Cela m’a ainsi permis de m’entraîner l’esprit léger 🙂.
Une épreuve de 100 km en course à pied : quelle idée 😬?
La clôture des inscriptions se fait lundi soir à minuit et la course a lieu le samedi. Je me suis inscrit à 23:45.
C’est décidé, ce 100 bornes sera une longue séance de travail. Je souhaite gagner en endurance, en résistance. L’objectif est de terminer.
Je suis habituellement un coureur réfléchi. Partir sur une telle aventure dans ces conditions me ressemble peu. Alors que beaucoup de coureurs suivraient un plan, voilà que je me lance dans un nouveau défi sans préparation spécifique.
Je n’ai pas fait de séances spécifiques mais mon volume hebdomadaire kilométrique en course à pied est de 70 km. A cela s’ajoute le vélotaf qui représente 130 km hebdo. La saison de trail m’a maintenu bien en forme également.
Un 100 km n’en reste pas moins une épreuve très ambitieuse. J’ai donc consulté les copains qui ont l’expérience de ce type de course. Se présenter sur la ligne de départ plutôt frais et avec l’esprit détendu sera un atout. La durée de l’épreuve ne m’impressionne plus. Et la météo checkée jusqu’à lundi soir m’offre de bonnes conditions de course.
Je me demande juste si mes jambes et les articulations vont pouvoir tenir l’allure course à pied.
100km de la Somme Amiens Picardie : jour de course
Pour cette aventure, ma chérie fera aussi ces 100 bornes; à vélo. Les connaisseurs savent que c’est aussi une épreuve pour le suiveur (attention les fesses).
Finalement, la météo annonce une belle journée ensoleillée avec une chaleur surprenante à cette époque de l’année. Je prends le départ avec le strict minimum : short, débardeur, chaussures minimalistes. Pour le reste, ma femme est chargée comme un bourricot 😂😂.
Light Feet Running
Concernant le rythme, ce sera du Cyrano : des cycles de 14mn de course et 1mn de marche.
La minute de marche me servira surtout à gérer l’effort mais aussi à m’hydrater et à m’alimenter (en plus des ravitos). Bien soigner le salé pour anticiper les pertes de sel. Et avec la chaleur qui s’annonce, il vaut mieux.
Le Light Feet Running toujours à l’esprit pour soigner ma foulée. Je sais que je ne pourrai pas développer la poulaine (car les allures seront basses). Par contre, ce sera un énorme focus sur la base de la pyramide LFR (posture, cadence, pose de pied sous le bassin, utilisation appliquée des bras). De même, ce sera l’occasion pour moi d’essayer des choses au niveau des hanches. En fait, mon idée est d’oublier mes jambes pour que le haut du corps (tout ce qui est au dessus du bassin) m’emmène sur ces 100km. Je sais que cela va retarder le moment où la fatigue pointera le bout de son nez.
Courir : c’est aussi créer des liens
Le départ est à 07:00 et nous arrivons vers 06:15 pour récupérer nos dossards. La température est déjà douce.
Fin prêt 10mn avant le GO, je rejoins un autre coureur : Trong avec qui j’ai bien sympathisé via FB.
Nous avons un peu près le même niveau sportif. On part ensemble histoire de discuter un peu. Je le laisse filer 30mn plus tard afin de faire le Cyrano. Je souhaite rester dans le rythme que je me suis fixé (cela me réussira). J’avais aussi la crainte de troubler sa stratégie de course. Je sais que sa prépa a été sérieuse.
Gestion de course
L’épreuve se déroule sans aucun problème sur la première moitié de course. Je cours au cardio depuis le début : 140bpm (pourquoi ce choix? : ici). Je soigne bien l’hydratation, des petites parts de sandwich home made (protéine /glucides), jus de soja chocolaté, boisson isotonique fait maison et les ravitos pour compléter.
Je m’attendais à un parcours ennuyeux. Il n’en a rien été. Ma femme discute facilement avec les gens. Ça sera un atout car cela occupe bien le temps. Elle anime un peu le parcours avec la musique. Les autres coureurs en profitent….ou pas (mais ça avait l’air 😀).
crédit photo : Sophie
On évite les soucis
Vers le Km50, ma chérie me propose un massage léger des jambes; histoire de mieux faire circuler le sang dans les jambes. J’accepte juste après le contrôle du Km52. La fatigue musculaire me gagne. C’est le moment de faire un break un peu plus long.
C’est reparti jusqu’au Km70 sans réel soucis. Je discute à nouveau avec d’autres coureurs.
Peu avant le Km70, je croise Trong qui entame le retour et Léonard (alias Joss), un ancien de mon club d’athlétisme. Je suis surpris de revenir sur lui.
Au Km70, je fais à nouveau un arrêt PIT STOP : massage et checkup des pieds. Mis à part la fatigue normale (comme les autres coureurs), ils vont bien. Les ALTRA vanish-r sont un bon choix : mes pieds sont à l’aise et ont la place nécessaire. Au besoin, j’ai prévu mes sandales de secours dans le panier.
Bon. Je m’aperçois que les chaussettes sont bien usées par les frottements au niveau de la plante des pieds. Je mets une nouvelle paire après avoir mis de la nok. D’ailleurs, j’ai fait attention de bien noker les zones de frottements. Tout s’est bien passé jusqu’à la fin : ni ampoules, ni brûlures.
Le combat commence
C’est reparti. Le mental est toujours bon.
Il reste un tiers à parcourir et je dois absolument rechercher à soulager l’impact au sol. J’essaye au mieux d’être actif au niveau de la hanche et des bras afin de maintenir la fréquence; c’est ce qui me permettra d’avancer.
Je passe le Km80 et ça commence à bien coincer. Je rattrape Joss lors du ravito et c’est encore plus compliqué pour lui. Au moment de repartir, il me suit. J’assume mon rôle de lièvre à ce moment. Je me dis que cela peut nous être bénéfique à tous les deux. Une émulation réciproque : pourquoi pas? Mais il ne tiendra que 2 ou 3 km.
Au Km88 : j’ai besoin d’un nouveau massage. Mais je trouve surtout un peu de répit.
C’est vraiment à ce moment que je livre le combat mental. Il va falloir serrer les dents jusqu’à la ligne d’arrivée. Par rapport à d’autres coureurs, j’ai de la chance. Mes jambes répondent encore un peu. Je n’ai pas de crampes qui m’obligent à marcher.
C’est vers le Km90, que je retrouve Trong (peu avant un ravito). Il est aussi en difficulté. Ma femme essaye de voir si elle peut lui apporter de l’aide. De mon côté, je recharge une dernière fois puis repars de suite afin d’en terminer le plus vite possible; tant que j’ai encore des forces.
Elle a ce qu’il faut dans le panier pour tenter de lui apporter une petite solution. Mais finalement, un bénévole est venu. Ce qui l’a obligé à s’effacer. Elle m’a donc rejoint.
En ligne de mire
Les minutes défilent et je file vers l’arrivée pour tenter de faire le sub 12h00. C’est compliqué, très compliqué mais le moral est là. Je ne m’en rends pas compte mais ma femme me dira ensuite qu’elle avait de la peine à me voir souffrir. C’est surprenant car je n’avais pas un sentiment si extrême. Mais les images que je verrai par la suite ne laisse aucun doute.
Je vois l’arche au loin. Ce n’est pas la foule d’un gros marathon mais les badauds m’encouragent et me félicitent. Je passe la ligne d’arrivée en 11h56.
Passer la ligne d’arrivée d’un 100 km sur route : une satisfaction
Le Cyrano aura été une bonne méthode pour gérer mes allures. Les jambes ont tenues jusqu’au bout. Je n’ai pas été contraint de marcher.
Il n’y a pas eu de moments de détresse. J’ai le sentiment d’avoir opté pour une stratégie qui m’a bien fait vivre cette course de 100km sur route.
A nouveau, le Light Feet Running de Solarberg Séhel m’emmène dans de bonnes conditions vers la ligne d’arrivée. Cette optimisation de la fréquence, du travail du haut du corps, distribuent bien les efforts sur l’ensemble du corps. Running economy : c’est ça 😊?
Non, blague à part, être attentif à ma foulée m’a permis de repousser le moment où la fatigue allait me fracasser. Bien sûr, sur ce type d’épreuve, il ne s’agit pas d’avoir une foulée telle que je pourrais l’avoir sur une course rapide. Mais les fondamentaux m’aident à limiter une usure prématurée, et à bien distribuer l’effort sur l’ensemble du corps. Sans cela, le déroulement de la course était tout autre; d’autant plus que je n’avais pas de prépa spécifique…
Une course en duo
Cette course n’aurait pas eu la même saveur sans celle qui partage ma vie.
Et oui !!! derrière la lumière, il y a l’ombre.
En fait, même si elle trouve qu’elle n’a rien fait d’extraordinaire, j’ai tout simplement bénéficié d’une assistance de haut niveau. Quelle motivation!! Quelle stimulation!! Une force de proposition face aux situations difficiles!!
Le lâcher-prise : ce n’est pas mon truc. Et pourtant, j’ai réussi (je trouve) à lui confier les clés.
MERCI ma CHERIE !!!
Un bel évènement
Concernant le parcours et l’organisation, c’est une bonne surprise. Nous ne sommes pas en montagne mais le paysage est agréable le long de la Somme. Amiens et sa cathédrale est une chouette ville. Quant aux bénévoles : ils nous ont bien fait sentir la chaleur humaine des gens du nord. Bravo à vous.
Finalement, les ingrédients étaient réunis pour que je passe une belle journée.
Et comme dirait certains camarades de course : c’est dans ce type d’improvisation qu’on fait les plus belles courses. Car il n’y avait aucune attente, aucune pression psychologique, aucune contrainte d’entrainement.
Et fier d’être un 100 bornard (💯) 😉
Moment de partage
L’aventure continue.
A nouveau, pour celles et ceux qui découvrent mes récits, n’hésitez pas à me laisser un commentaire (ci-dessous). Peut être avez-vous vécu ce même type d’expérience (ou souhaiteriez vous tenter l’aventure du 100km). Profitez de l’occasion pour partager vos impressions 🙂.
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A vos baskets !!!
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Merci Antoine pour ce CR de 100 bornes! Tes publications genereuses sont toujours pleines de détails qui sont formateurs.
J’apprécie bcp ton site, qui m’a permis de faire une transition minimaliste reussie, même si j’y travaille encore régulièrement.
J’ai discuté avec ton épouse lors de la reco du trail des Châtaignes du samedi 20 octobre, elle m’a aussi donné des conseils intéressants.
On se verra probablement dimanche prochain au depart du 31km du TDC.
Au plaisir de faire ta connaissance.
Bernard.
Merci Bernard pour ton témoignage.
C’est génial que ta transition soit sur une bonne voie.
Tu verras que cette sensibilité te permettra de mieux progresser; en toute conscience.
Et oui, on essayera d’échanger quelques astuces lors du trail des châtaignes. J’y serai en tant qu’observateur.
Fais moi signe si tu me vois. C’est un plaisir de partager avec les coureurs.
Sportivement
Bonjour Jo Antoine,
Je viens de lire à l’instant ton témoigne sur ton 100 km de la Somme et cette lecture vient me confirmer que la foulée LFR est tout à fait envisageable pour des distances longues telles 100 km. J’étais persuadé de la validité de la démarche pour le marathon, mais au-delà … Je n’avais pas trouvé de témoignage sur des distances de ce type, alors j’ai « testé », en trail, des distances de 80 km. Mais ces courses sont très différentes par rapport aux 100 km sur bitume. Par exemple, la plupart des traileurs marchent généralement dans les montées « significatives ». L’effort musculaire est ainsi entrecoupé de temps de marche « forcée » en raison du dénivelé. Les groupes musculaires sont sollicités un peu à tour de rôle, permettant, dans une certaine mesure bien sûr, de « récupérer ». On ne retrouve pas ce type de « soulagement » sur un 100 km. J’ai couru les 100 km de Millau lorsque je pratiquais une attaque classique au sol par le talon. J’ai donc une idée de l’énorme effort que tu as dû déployer pour boucler une distance pareille. Ton témoignage me conforte donc dans l’idée d’essayer à nouveau, mais en foulée LFR. Mais ça me semble toutefois être une épreuve plus difficile au niveau musculaire et tendineux qu’un trail de 80 km. Avec juste l’idée, bien sûr, de terminer en étant dans le meilleur état possible. Bonnes courses et encore merci ton récit. Très instructif et enrichissant. PS : ça donne envie de participer aux 100 km de la Somme !!
Merci pour ton témoignage Jean-Luc
En effet, cela n’a rien à voir avec un trail de 80 km. Cette répétition ‘monotone’ de la foulée n’est pas à prendre à la légère (sauf pour tes pieds ). Le parcours plat a vraiment permis de souligner l’intérêt d’avoir une foulée construite.
Je suis content d’avoir fait Amiens avant les 100km de Millau (que je ferai un jour; tellement il est emblématique). Le D+ de Millau demande une expérience bien plus solide. Et le choix de l’accompagnateur est un élément qui compte énormément pour mieux vivre une telle course.